Bonjour,
est-ce que vous vous êtes déjà demandés pourquoi le clavier français sous Windows s’appelle « Français » et pas “Français (France)” ?
La réponse, c’est que contrairement à une idée reçue fausse, il n’est pas officiel.
De nombreux autres pays du monde l’ont fait, mais notre gouvernement n’avait jamais fait normaliser le clavier d’ordinateur. Lui seul en effet, et plus précisément le Ministère de la Culture et de la Francophonie, est habilité à faire élaborer
et à rendre obligatoires des normes en matière de clavier. Or que ce soit lors de la création du jeu de caractères incomplet ISO 8859-1 (Latin-1, fait pour écrire les langues d’Europe occidentale mais ne permettant pas d’orthographier correctement le français),
ou lorsque Microsoft n’a pas tardé à recompléter cette norme défectueuse en définissant le jeu de caractères Windows-1252, ou encore lorsque l’ISO a réparé elle-même son erreur par une nouvelle page de code, ISO 8859-15 (Latin-9), faite pour remplacer Latin-1,
jamais, jamais aucun responsable politique n’a fait doter la France d’une bonne disposition de clavier. C’est uniquement de nos jours, grâce au gouvernement actuel, que ce processus est engagé.
Le résultat des courses, c’est que depuis des dizaines d’années, la grande majorité des utilisateurs/-trices sont obligé(e)s de continuer de s’embêter de plus ou moins bonne grâce avec un clavier défectueux, soit en écorchant notre langue (c’est-à-dire,
en décapant les majuscules accentuées et en arrachant le E dans le O pour le taper à côté), soit en perdant beaucoup de temps avec des complications inutiles et contre-productives (raccourcis clavier longs, saisie à codes, tables de caractères spéciaux).
Les problèmes sont nés de la fusion de la chaîne typographique avec la dactylographie informatisée (dite traitement de texte) pour donner naissance à la PAO, le Desktop Publishing (on commença à publier directement depuis son bureau). De simples
périphériques de sortie à l’origine, les imprimantes en sont venues à se substituer aux rotatives. Celles d’IBM et de Bull ne contenaient pas le Œœ (à l’instar de nos machines à écrire), et c’est d’ailleurs un employé de Bull qui (probablement pour éviter
que sa société soit obligée de fournir des mises à jour gratuites à des clients en colère) a insisté au sein du groupe de travail de l’ISO pour que le Œœ reste exclu de la page de code dite Latin-1.
On a parlé de machines à écrire... Pour remonter jusqu’au début de la chaîne des responsabilités, il faudrait parler du ou des technicien(s) obscur(s) que jamais les historiens ne sont parvenus à identifier, qui ont défini l’agencement de clavier
français de France. Sans mettre en cause son ergonomie (azerty plutôt que qwerty), il faut relever l’ineptie de la touche ² qui en France ne comporte pas le ³ et qui (sachant que sur les machines à écrire de toute manière, tous les “exposants” et “indices”
s’obtiennent en décalant le papier d’un cran) devrait porter plutôt le œ et le Œ. C’est ce que fera d’ailleurs, bien plus tard, le créateur de l’agencement Latin-9 sous X.Org, disponible aussi sous Windows grâce au travail de Patrick Lamaizière. Peut-être
la normalisation du clavier français, actuellement en cours, retiendra cette option.
Car en ajoutant aujourd’hui, le ³ sur la touche du ², nous ne prêterions que davantage à rire que nous n’avons déjà dû le faire, certainement aussi au sein de Microsoft qui n’a même pas ajouté le Ÿ dans la liste du tréma quand ce caractère s’est
enfin vu ajouter, dans ISO 8859-15 (Latin-9), à son petit frère le ÿ présent dès ISO 8859-1 (Latin-1). Mais le Ÿ est présent aussi dans Windows-1252 !
On décrypte que Microsoft (à la différence de son concurrent Apple) se sert du clavier improbable qu’il nous a fait, comme d’un outil marketing pour mettre en valeur les applications qu’il nous vend. Microsoft Word contient ainsi des raccourcis
clavier palliant l’absence de œŒ, de Ç, de É et de touche morte accent aigu en général, en plus de faire de l’autocorrection. Mais déjà dans Excel, ces raccourcis clavier n’existent pas, et les utilisateurs/-trices regrettent de ne pouvoir y taper un Ç, de
ne pouvoir y modifier la casse que par une fonction, et peut-être d’autres choses encore.
Aujourd’hui il est temps d’en finir avec toutes ces vieilleries, mais il a vraiment fallu refaire le point, car pour nous, il n’y a aucune matière à s’enorgueillir.
Microsoft est en situation d’impolitesse à l’égard de la France et doit lui présenter des excuses, par rapport au clavier pour rire avec lequel il nous brime depuis des décennies. Il peut se racheter en implémentant dans Windows 10, entre autres
choses, les touches mortes multiples, ce n’est pas irréaliste, cela fonctionne déjà en ce moment sous Ubuntu.
Cordialement,
MarcelSchneider654